Impôts locaux et coliving : quelles obligations fiscales pour ces nouvelles formes d’habitat partagé ?

Impôts locaux et coliving : quelles obligations fiscales pour ces nouvelles formes d’habitat partagé ?

Comprendre les impôts locaux : ce qu’il faut savoir avant de se lancer dans le coliving

Le coliving, nouvelle tendance de l’habitat partagé, séduit de plus en plus de jeunes actifs, d’étudiants et de travailleurs nomades. Favorisant la vie en communauté, ce mode de logement repose sur le partage d’espaces communs au sein de résidences meublées, souvent connectées et orientées vers la flexibilité. Toutefois, cette forme innovante d’habitation soulève des questions fiscales spécifiques, notamment en matière d’impôts locaux.

Les impôts locaux servent à financer les services publics des collectivités territoriales. Ils regroupent notamment la taxe foncière et la taxe d’habitation (qui vise encore certains logements secondaires ou vacants). Mais lorsque le bien immobilier est dédié à du coliving, plusieurs zones d’ombre apparaissent : à qui incombe le paiement de ces taxes ? Comment classifier ce type d’habitat d’un point de vue fiscal ?

Coliving : une forme d’habitat hybride soumise à des règles fiscales particulières

Le coliving évolue à la croisée de plusieurs régimes fiscaux. Ni tout à fait location meublée traditionnelle, ni totalement résidence étudiante, il peut être perçu à la fois comme une activité locative meublée ou comme une véritable offre de services para-hôteliers. Cette ambigüité influence de manière significative les obligations fiscales en matière d’impôts locaux.

Le profil de l’exploitant (particulier, société, acteur institutionnel) joue également un rôle crucial dans la taxation applicable. Il est donc essentiel d’analyser la nature des impôts locaux à travers plusieurs prismes.

Taxe foncière et coliving : qui est redevable ?

La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) est due par le propriétaire du bien immobilier au 1er janvier de l’année d’imposition. Cette règle s’applique également aux biens exploités en coliving. Ainsi, si vous êtes propriétaire d’un immeuble de coliving – que vous l’exploitiez vous-même ou le confiiez à un gestionnaire –, vous êtes responsable du paiement de la taxe foncière.

Lire  "Les exonérations méconnues des taxes locales : quelles opportunités en 2024 ?"

En revanche, les propriétaires peuvent être tentés de répercuter ce coût sur les résidents via les charges locatives. Toutefois, cette pratique doit respecter le principe de transparence et les règles de la location meublée. Lorsque le coliving s’apparente à une activité para-hôtelière (avec services inclus : ménage, wifi, petit déjeuner), une exonération de la taxe foncière peut être envisagée dans certaines conditions, mais elle reste rare et soumise à l’analyse du service des impôts.

Taxe d’habitation dans les résidences de coliving : applicable ou non ?

La taxe d’habitation a été largement supprimée pour les résidences principales depuis 2023. Néanmoins, cette suppression ne concerne pas les locations meublées de courte durée, ni les logements meublés non occupés à titre de résidence principale. Or, dans le coliving, les locataires occupent souvent les lieux temporairement.

Dans ce cas, deux scénarios peuvent se présenter :

  • Si le résident est considéré comme occupant régulier (locataire déclaré, avec un bail d’habitation ou contrat au-delà de 6 mois), il peut être redevable de la taxe d’habitation.
  • Si le logement est occupé de manière transitoire, ou s’il est assimilé à une forme de résidence à usage hôtelier, alors la taxe d’habitation pourra être exigée du propriétaire ou exploitant, notamment si les services fournis dépassent un simple hébergement.

Il est donc crucial d’évaluer la nature juridique du contrat liant le locataire à l’exploitant et la durée effective d’occupation. L’ambiguïté de la fiscalité du coliving rend indispensable une analyse précise selon chaque cas de figure.

Impact de la CFE et distinction entre activité privée et professionnelle

Autre impôt local : la Cotisation Foncière des Entreprises (CFE). Dès lors que le bien immobilier est utilisé dans le cadre d’une activité commerciale (mise en location meublée considérée comme professionnelle), la CFE est applicable. Elle est due par l’entité exploitante – qu’il s’agisse d’un propriétaire individuel en LMNP ou d’une société en LMP ou assimilée para-hôtelière.

Lire  Quels avantages fiscaux après 65 ans ? Découvrez les dispositifs pour alléger vos impôts

Le montant de la CFE dépend de plusieurs éléments :

  • la commune d’implantation du bien (taux local voté chaque année),
  • la valeur locative cadastrale des locaux,
  • le statut fiscal de l’exploitant ou de la structure gestionnaire.

Les structures de coliving dotées de services communs importants (conciergerie, salle de sport partagée, coworking, etc.) sont plus facilement qualifiées d’établissements commerciaux, augmentant le risque de soumission à cette taxe.

Coliving et requalification en établissement hôtelier : attention aux conséquences fiscales

Lorsque le modèle économique du coliving s’approche trop d’un modèle para-hôtelier (services inclus nombreux, accueil à la nuitée ou à la semaine, ménage régulier, services personnalisés), il peut être requalifié par l’administration fiscale comme un hébergement touristique. Cette requalification entraîne :

  • le paiement de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) si le chiffre d’affaires dépasse 500 000 € ;
  • la perception de taxes de séjour par les communes ;
  • une possible soumission à la TVA, notamment si plusieurs services hôteliers sont fournis ;
  • une évolution des règles de calcul des impôts locaux, en lien avec un régime touristique.

Les acteurs du coliving doivent donc veiller à calibrer leur offre de services afin de ne pas franchir le seuil de requalification fiscale, sauf s’ils intègrent ce modèle dans leur stratégie d’exploitation.

Quelques conseils pour optimiser la fiscalité locale d’un bien exploité en coliving

Il est recommandé de se faire accompagner par un expert fiscaliste ou comptable connaissant bien le secteur de l’immobilier alternatif. Voici quelques bonnes pratiques :

  • Identifier avec précision le statut du logement : colocation, location meublée, résidence de service, para-hôtellerie.
  • Évaluer la nature des services proposés aux résidents et le degré d’autonomie de ceux-ci.
  • Prévoir les impacts de la CFE et de la taxe foncière dans les modalités contractuelles avec les locataires.
  • Déterminer si le modèle de l’activité relève du commerce ou de la gestion patrimoniale.
Lire  Qui doit encore payer la taxe d'habitation en 2023 Comprendre vos obligations

En anticipant les charges fiscales locales, les exploitants peuvent non seulement sécuriser leur activité mais aussi mieux maîtriser la rentabilité de leur modèle de coliving.

Perspectives : une réglementation encore en évolution

Le coliving reste un secteur en plein développement, à la frontière entre hébergement collectif, cohabitation et service hôtelier. Les collectivités locales et l’administration fiscale peinent encore à définir un cadre stabilisé pour ces formes hybrides d’habitat.

Des projets de lois visant à encadrer davantage les régimes de fiscalité du logement partagé pourraient voir le jour, prenant en compte la spécificité de ces structures d’habitat à usages multiples. Par ailleurs, les communes tendent à s’intéresser de plus près à ces formes d’habitation pour réguler l’occupation du foncier, notamment dans les zones tendues.

À la croisée entre logement novateur et fiscalité locale complexe, le coliving nécessite une stratégie claire et conforme aux obligations légales. Une analyse rigoureuse de la situation est essentielle pour éviter toute mauvaise surprise fiscale et garantir la viabilité du projet sur le long terme.